Entretien avec Franck Thilliez, le maître du polar
La conception d’une couverture de livre est cruciale lors de sa création en auto-édition ainsi que de tout autre média. Elle attire l’attention, incite à la découverte et donne une première impression sur le contenu du livre. Choisir un ou des bons visuels de couverture est donc primordial dans la réussite de votre ouvrage.
Franck Thilliez, auteur de polars à succès, a eu la gentillesse de nous accorder une interview dans laquelle il nous livre ses conseils.
"Dîtes vous que les livres écrits ne sont jamais perdus. Ils existent, c'est le plus important."
(Crédit photo : Didier Cohen)
Comment choisissez-vous le sujet de vos livres ?
Cela dépend des romans et des envies. Pour La chambre des morts, c'était le décor (l'immense zone industrielle de Dunkerque qui, la nuit, ressemble à une station spatiale !) qui m'a donné le noeud de l'intrigue. Pour Vertige ou La forêt des ombres, c'était l'envie d'écrire un huis-clos, un genre dont je suis totalement fan. Pour Angor, Pandemia et Rêver, mes trois derniers romans, j'ai fonctionné de façon différente : je suis parti d'un thème scientifique que j'avais envie de traiter (le circuit des greffes d'organes, les virus et le sommeil) pour en faire une histoire. Bref, il n'y a pas vraiment de règles me concernant. Il faut écrire sur des thématiques avec lesquelles on se sent à l'aise.
Avez-vous un conseil pour bien débuter une histoire ?
Cela dépend des genres littéraires, du rythme que l'on veut donner à l'histoire. Pour le thriller/policier, je pense qu'il faut entrer très vite dans le vif du sujet. Présenter les personnages dans l'action, faire ressortir leur caractère, leurs craintes, leur passé par leurs actes plutôt que d'interminables pages de flashback ou de pensées intérieures. Le début doit être particulièrement soigné, il doit emmener très vite le lecteur dans votre imaginaire... En général, je commence souvent mes romans par une scène surprenante, décalée, qui soulève un tas de questions.
Comment surmontez-vous l’angoisse de la page blanche ?
Après 15 romans, je me suis rendu compte que cette angoisse était nécessaire, elle fait partie du processus de l'écriture et si elle est absente, alors ce n'est pas normal ! C'est un peu comme un grand chanteur qui a fait des années de scène et qui continue à avoir le trac avant chaque concert. Au départ, comme le trac, le syndrome "Page blanche" n'est pas évident à surmonter, on doute, on pense qu'on n'arrivera jamais au bout... Puis on finit par s'y faire. Quand je bloque, aujourd'hui, je me dis "c'est normal, c'est que ton histoire est bonne ! Va faire un tour, reviens plus tard et ça ira mieux..."
Comment construisez-vous vos personnages ?
J'y attache autant d'importance qu'à l'histoire que je vais raconter. Une bonne histoire avec des personnages médiocres fait, à mon sens, un mauvais livre, ou un livre qu'on oubliera vite. Les bons personnages restent dans l'imaginaire des lecteurs longtemps après la fermeture du roman. Il faut donc leur accorder beaucoup d'attention au moment de la création. Je me fiche de leur physique (je les décris d'ailleurs très peu) ou de savoir s'ils roulent en voiture essence ou diesel. Ce qui compte, ce sont leurs traumatismes, leurs démons, leurs obsessions, qui auront des répercussions sur leurs actes.
Quel est selon vous le titre de livre parfait (et existe-il) ?
Trouver un titre est toujours un casse-tête, il n'y a pas de règles. Au départ, j'étais dans les titres assez longs (La chambre des morts, La mémoire fantôme, La forêt des ombres) et dernièrement, ils ne comptent plus qu'un mot (ou quasiment) : Vertige, Gataca, Atomka, Pandemia, Rêver (palindrome, se lit à l'envers comme à l'endroit), Puzzle... Un titre doit immédiatement caractériser le genre du livre, avoir au minimum un rapport avec l'histoire, être parlant... Mais il y a toujours des exceptions, bien sûr. Par exemple, Gataca n'est pas vraiment parlant, mais il fait partie des titres "étranges" qui caractérisent ma série avec les personnages Sharko/Henebelle. C'est un peu une marque de fabrique.
Comment savez-vous quand votre livre est terminé ?
Quand j'ai écris le dernier chapitre. A ce moment, l'histoire que je raconte est terminée, mais pas le livre, il y a toujours les relectures, les corrections, les ajustements. Mais pour moi, être allé au bout d'une histoire, c'est avoir fini. Le reste n'est que détails.
Avez-vous un conseil à donner à un auteur débutant qui voudrait se faire connaître ?
Raconter une histoire en étant son propre lecteur, et en se disant : "Est-ce que cette histoire me plairait en tant que lecteur ? Est-ce que je serais prêt à acheter ce livre ?" Soigner ses personnages, et ne jamais baisser les bras, car le chemin vers le succès est tortueux. Mais dites-vous que les livres écrits ne sont jamais perdus. Ils existent, c'est le plus important.
Quel regard portez-vous sur l’autoédition et son développement actuel ?
L'autoédition est une bonne solution quand on se heurte au mur de l'édition traditionnelle. Ce n'est pas parce qu'un livre n'est pas édité par voie classique qu'il n'est pas bon, il a juste échappé aux radars des maisons d'édition. L'autoedition permet au livre d'exister, à l'auteur d'avoir des lecteurs et d'ainsi de récupérer des retours de lecture sincères de gens qui ne vous connaissent pas. Ces retours sont-ils globalement bons ? Mauvais ? Dans tous les cas, ils permettront à l'auteur de s'orienter et de savoir s'il est fait pour raconter des histoires qui plaisent.
Un immense merci à Franck Thilliez pour sa disponibilité et sa gentillesse.